2016-12-01

Un bouquet de lilas blancs

Une lectrice attentive que je remercie vivement, attire notre attention sur le bouquet de lilas dont il est question dans l’article précédent sur les mariages à Lyon au XIXe siècle.

La lettre de Jeanne, datée du 28 janvier 1891, annonce le prochain mariage de sa fille Elisabeth.



Dans cette lettre délicieuse, tous les mots comptent.
Jeanne vient d’accepter la demande en mariage et tout va aller très vite : « c’est à la vapeur … »

Depuis onze mois, Jeanne hésite à donner son accord, mais ce jour-là elle ne résiste pas. Elle paraît la première à être surprise de prononcer le "Oui" qui a débloqué la situation.
On peut imaginer la joie du jeune homme persévérant.
Élisabeth a 20 ans, elle est jolie. Elle ne se fait pas prier pour se présenter à son futur beau-père et à son fiancé. Elle apparaît « en toilette assez négligée » la visite ayant lieu le matin, la jeune fille ne s’attend pas à devoir faire toilette si tôt.


En tout cas, elle vient saluer « sans faire la moindre difficulté », il est évident que la jeune demoiselle a été consultée, le projet de mariage lui convient.
Charles va avoir 27 ans, il est clerc de notaire. Peut-être n’a-t-il pas encore une situation confortable, mais son père a su convaincre la future belle-mère. 

« Un moment après nous recevions un paquet de lilas blancs ».
Le futur marié sait se conformer à la tradition de faire livrer illico un bouquet dans la maison de la future. S’est-il posé la question du symbolisme des fleurs ?  Au XIX, le langage des fleurs est chargé de sens, le lilas blanc annonce l’amour naissant idéalisé, il veut dire : aimons-nous.

Edouard Manet, Lilas dans un vase, 1882

La question posée est celle-ci :
Le bouquet est livré le 28 janvier, comme le précise la lettre de Jeanne. 
Comment un fleuriste lyonnais peut-il trouver des lilas blancs en cette saison ? Au mois de janvier, sont-ils en fleurs sur la Côte d’Azur ? Viennent-ils d’Italie ou d’ailleurs ?
J’attends vos suggestions …

Merci aux lecteurs qui ont contribué à chercher ces réponses, à voir ci-dessous ...↘

Plusieurs lecteurs fréquentant les réseaux sociaux ont fait des recherches pour me donner des indices répondant à la question. 
Voici des pistes pour mieux comprendre les bouquets de fleurs.

La culture sous serre était pratiquée avant le XIXe siècle. Depuis longtemps Lyon est célèbre pour ses horticulteurs. Ces spécialistes expérimentaient les cultures exotiques et amélioraient les cultures régionales, ils savaient promouvoir des idées nouvelles au sein de sociétés savantes.
Connaissaient-ils les techniques de greffe des branches ?
Aurélie, passionnée des plantes et des jardins a trouvé ce lien expliquant que l’on peut hâter la floraison avec une greffe ingénieuse.
https://books.google.fr/books/content?id=FupPAAAAcAAJ&hl=fr&pg=RA1-PA215&img=1&zoom=3&sig=ACfU3U0Te2j0xSbMwAOaAlKcNQqI1Ky_vA&ci=120%2C543%2C707%2C210&edge=0
Plus précisément le lien qu’elle indique va révéler le secret du lilas fleuri en janvier :
« Voici le livre "Les veillées de la chaumière" en 1823 de la Comtesse de Genlis, d'où je tire l'explication, page 12 pour l'extrait qui concerne dans quel cadre fut utilisé ce bouquet. »


A propos du langage des fleurs, Charles savait-il le maîtriser? Les fleuristes ont certainement su le conseiller sur le choix du bouquet, car sa situation mérite une attention particulière. On peut supposer que le jeune homme s’est bien renseigné et n’a pas lésiné. Dans cette circonstance de promesse d’épousailles, il s’agit de bienséance, ce n’est pas le moment de commettre un impair.
La livraison de fleurs se pratique depuis l’Antiquité. Il est évident que l’on ne voit pas le fiancé apporter lui-même un énorme bouquet que le fleuriste vient de composer.
En ce mois de janvier 1892, la question est de savoir comment s'approvisionnaient les kiosques à fleurs de Lyon. Le marché aux fleurs se tient sur la place Bellecour depuis 1826. Élisabeth habitait justement 22 place Bellecour. Charles et son père ont choisi le bouquet en sortant de chez elle.



Fanny-Nésida, généablogueuse et fidèle lectrice, suggère que ces lilas pourraient venir d’Italie.
« J’opte pour la Ligurie, San Remo qui fournissait la cour de Vienne, pourquoi pas Lyon ?» twitte-t-elle.
A cette époque, Lyon était desservie par les chemins de fer, les transports fluviaux et les routes qui se modernisent.
Cyril a même posé la question à une fleuriste qui pense aussi à une provenance italienne. Elle ajoute que le lilas étant assez fragile à conserver et à transporter sans les moyens modernes, il pourrait s’agir de la viorne plus résistante.

Je remercie tous ceux qui m’incitent à retracer avec davantage de précisions le scénario de cette demande en mariage.

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